10 mai 2009

Femmes bourreaux


On pourrait citer de nombreux exemples de femmes de bourreaux qui ont assisté leurs maris dans l’exercice de leurs hautes œuvres. Surtout sous l’ancien régime.

En 1625, le bourreau de Dijon nommé Simon Grandjean avait été chargé d’exécuter Hélène Gillet, une jeune aristocrate de vingt-deux ans condamnée à mort pour infanticide par le présidial de Bourg puis par le parlement de Dijon. Le jour dit, une foule immense se pressait sur la place du Morimont. Comme la condamnée était noble, la tradition imposait qu’elle soit décapitée à l’épée. L’un des exercices les plus difficiles pour un bourreau. Evidemment, Simon Grandjean manqua la malheureuse. Sous les huées du public il tenta d’achever la décapitation en portant plusieurs coups successifs à la jeune femme, ne réussissant qu’à la blesser. Paniqué par la foule en colère, il lâcha son épée et couru se réfugier dans une petite chapelle qui se trouvait au pied de l’échafaud. C’est alors que son épouse (qui appartenait à une grande famille d’exécuteurs : les Chrétien) se présenta pour achever la besogne. D’abord, elle tenta d’étrangler Hélène Gillet avec la corde qui la liait. Sans succès. Puis, elle la tira jusqu’aux marches de l’échafaud. Là, malgré les pierres que les spectateurs commençaient à lui lancer, elle s’arma d’une énorme paire de ciseaux qu’elle avait apportée pour couper la chevelure de la suppliciée. Elle échoua dans sa tentative de lui trancher la gorge, ne parvenant qu’à la blesser un peu plus en lui plantant les ciseaux en divers endroits. C’était trop pour la foule qui se déchaîna contre l’exécuteur et son épouse : ils furent lapidés à mort. On parvint à sauver la condamnée qui, finalement, obtint des lettres de grâce de Louis XIII. Elle termina sa vie dans un couvent de Bourg.

En 1793, à Uzerche, on utilisait pour la première fois la guillotine. Le condamné, nommé Piarrissou, était gros et gras. Comme la machine était mal montée, la lame ne fit qu’entamer la nuque. Par trois fois, on remonta le couteau sans parvenir à le décapiter. Le sang giclait partout. Complètement désemparé l’exécuteur abandonna l’opération et choisit de s’enfuir. A la surprise générale, on vit alors paraître sa femme qui lui servait d’aide. Elle sortit un couteau de boucher qu’elle avait apporté «à tout hasard » et, en moins d’une minute, scia la tête du supplicié.

A Bruxelles, en 1840, un assassin avait été condamné à mort. Or, il n’existait aucun exécuteur dans cette ville. On fit appel à celui de Liège, nommé François Hamel. Mais c’était un homme faible et malade, âgé de soixante-quinze ans, qui n’avait plus exercé depuis bien longtemps. Le bourreau de Liège, inquiet à l’idée de perdre peut-être ses gages, décida d’envoyer son épouse. Agée de quarante ans, celle-ci se nommait Charlotte Reine et descendait d’une grande famille de bourreaux de l’Est de la France. Hamel lui expliqua les gestes qu’il fallait accomplir et l’envoya se présenter à sa place, à Bruxelles. Le procureur du roi fut très surpris de voir cette femme, pleine d’assurance, qui se déclarait prête à exécuter le condamné. On en référa au ministre de la justice et l’offre fut déclinée. Finalement, l’assassin obtint sa grâce et la bourrelle fut priée de rentrer chez elle. Hamel fut mis à la retraite en janvier 1843 et mourut en 1846, âgé de 80 ans. Sa femme lui survécut jusqu’en 1883.

Enfin, je n’évoque que pour mémoire le cas de Marguerite-Julienne Le Paistour (née à Cancale le 2 août 1720) sur laquelle j’ai trouvé des documents inédits. J’en parlerai, plus en détails, dans un prochain message. Cette jeune femme avait décidé de quitter sa famille et de mener une vie aventureuse sous des habits d’homme, se faisant appeler Henri. Après plusieurs années passées dans les armées, le hasard lui fit rencontrer un bourreau qui l’engagea comme aide. Pensant naturellement qu’il s’agissait d’un homme. C’est ainsi que « Monsieur Henri » devint l’aide du bourreau de Strasbourg puis de celui de Montpellier. Finalement, Marguerite/Henri fut nommée bourreau de Lyon, en novembre 1746. Après avoir exercé pendant plusieurs mois ce difficile office, elle finit par être impliquée comme complice d’une bande de voleurs. Emprisonnée plusieurs mois, elle fut relâchée lorsqu’elle épousa, le 26 novembre 1749, un valet du nom de Noël Roche.

Jourdan

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